Photo du jour : élucubrations routières

"De n’importe où on peut s’élancer vers le ciel. "Sénèque

Ce soir, un ciel de traîne teinté de rose caresse mes pensées.

Je roule automatiquement, la journée fut rude.

La lumière rasante du début de soirée enveloppe la campagne alentour.

Je suis la route en pensant aux rencontres de la journée, aux regards croisés, aux mains serrées, aux sourires échangés.

La journée fut riche en rencontres, et en surprises, comme je les aime.

Une belle surprise qui vous peindrait le ciel tout entier de rose et de bleu, a illuminé mon après-midi, et je m’en repasse le film en boucle !

Je suis perdue dans mes pensées et je souris toute seule à ce ciel si beau qui est assorti à mon humeur légère.

Heureusement que la voiture connaît bien le chemin, comme dans cette histoire que me racontait ma mère en souriant. Les jours de foire, mon grand-père se rendait à la ville voisine pour vendre les produits de sa ferme, fruits, légumes, œufs, petits animaux de basse-cour. Sa journée était riche en rencontres et en émotions, déjà, et quand il rentrait à la nuit tombée, il dormait sur son siège en tenant les rênes de son cheval de trait nommé "Buffalo". L’animal suivait sa route tranquillement et le ramenait sans encombre à la maison, où ma grand-mère venait le réveiller pour qu’il dételle et aille se coucher.



Ma voiture est moins intelligente mais elle et moi, nous formons une belle paire ! Elle ronronne quand je musarde sur les chemins, comme ce soir. Parfois elle rugit quand j’ai envie de vitesse. (Mais chut… !)

Feu rouge.

Une pause en silence.

Autour de moi, la rue est déserte. Je lève les yeux vers le feu rouge. Il se détache sur un nuage déguisé en barbe à papa. On dirait l’œil écarlate d’un robot-girafe qui me regarde.

Son regard rouge me surveille, outré, on ne sait jamais s’il me prenait envie de démarrer, malgré son interdiction, il émettrait probablement un sifflement désapprobateur !

En fait il est surtout vexé parce que je contemple les nuages qui l’entourent, lui donnant un air de danseuse anorexique en tutu. Il brille de plus en plus fort pour monopoliser l’attention.

Alors, pour lui faire plaisir, je sors mon portable et le photographie.

Il sourit d’un air benêt, et je sens bien qu’il est ravi aux petites étincelles orangées qu’il m’envoie.

Une seconde plus tard, il ferme les yeux. Son frère ouvre les siens, d’un beau vert émeraude, et j’apprécie le contraste nouveau de cette couleur sur le fond rose et bleu du ciel nuageux.

Je le gratifie aussi d’un cliché et lui sourit. Personne ne me suis, alors je le contemple quelques secondes avant de démarrer, ce qui ne lui arrive pas souvent.

Puis je me décide à repartir avant que son frère magenta ne se réveille.

Deux clichés sans intérêt, dans ce monde où il faut être performant à chaque seconde.

Deux clichés qui me rappelleront ce moment de tranquille rêverie.

Finalement deux petits cailloux colorés sur mon chemin, que je garderai dans ma boîte aux trésors.

Juste une dernière élucubration : J’aurais bien grimpé sur le cou de la girafe-robot aux yeux vert et rouge pour goûter à la barbe à papa, avant de rentrer.

Ce sera pour une autre fois…